Marc DIXNEUF

Directeur Général – AIDES

Santé : comment communiquer de façon responsable ?

Communiquer de façon responsable en santé, c’est d’abord prendre en considération un environnement souvent défavorable à une communication juste. En matière de santé, les fake news et les idées reçues sont nombreuses, le Covid l’a montré. Des entreprises privées importants peuvent avoir des intérêts importants contradictoire avec les politiques de santé : agroalimentaire, industrie automobile, tabac. Les gouvernements eux-mêmes peuvent avoir des positions ambiguës selon les sujets de santé, sur l’importance de la vaccination, la prise en compte des déterminants de santé et les choix à faire pour que les plus pauvres aient aussi une bonne santé.

Communiquer de façon responsable c’est ensuite prendre en compte que les personnes n’ont pas toujours envie d’entendre la réalité des risques de santé, soit parce que cela les renvoie à leurs propres pratiques qui sont stigmatisées, soit parce que cela concerne des populations que l’on ne veut pas voir.

La communication responsable en santé c’est donc de dire les choses telles qu’elles sont, mais de manière adaptée au public. Si l’on s’adresse à une cible particulière, les personnes ne doivent pas se sentir jugées dans leurs pratiques, ce serait les rejeter. Si l’on communique sur une maladie, être responsable c’est à la fois casser les idées fausses, dire dans une langue simple « l’état de la science », et ne pas perdre de temps avec les trolls.

Quels sont les grands défis à venir pour la communication santé dans votre activité ?

Nous avons deux grands défis. Le premier est de casser les représentations datées sur les modes de transmission du VIH. Les représentations sur l’épidémie de VIH ont la vie dure. 40 ans après la découverte du virus, 27 ans après l’arrivée des traitements, 15 ans après la preuve qu’une personne vivant avec le VIH sous traitement ne transmet pas le VIH, cette épidémie fait peur, et ceux qui vivent avec sont rejetés.

Le second est de s’adresser aux groupes les plus exposés tout en sensibilisant le grand public à son rôle dans la lutte contre l’épidémie. Au premier temps de l’épidémie, tout le monde se sentait concerné. Les traitements arrivants, la concentration de l’épidémie dans certains groupes tendent à faire croire soit que ce n’est plus un sujet, soit que le sujet « ne me concerne pas ».

Il faut donc à la fois maintenir un haut niveau d’information générale sur l’épidémie de VIH pour lutter contre les discriminations, et avoir une communication très ciblée vers les groupes les plus exposés. Le grand public doit être sensibilisé au rôle qu’il peut jouer, en participant à la lutte contre les discriminations, et au soutien nécessaire qu’il doit apporter à nos organisations, mais sans jouer sur la peur de l’épidémie.

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